
365. C’est le nombre d’actes lesbophobes signalés durant l’année 2018, soit un par jour. Un constat dressé par l’association SOS Homophobie, dans un rapport publié mardi 14 mai 2019. Dans celui-ci, on s’aperçoit que les agressions envers les lesbiennes se déroulent surtout sur Internet (28% des cas) : insultes, harcèlement, menaces… C’est plus qu’en famille (14%), dans les lieux publics (13% contre 9% l’an passé) ou encore, au travail (10%). La principale manifestation de ces violences est le rejet, pour 78% des cas. Viennent ensuite la discrimination (un cas sur deux) et les insultes (39%).
Des chiffres sur la lesbophobie précis, mais aussi, trop rares. Selon Alice Coffin, journaliste, porte-parole de la Conférence Européenne des Lesbiennes (ELC), ceci s’explique notamment par le manque de ressources des associations de lutte contre l’homophobie : "Il n’y a pas de financement des associations de la part de l’Etat, donc il n’y pas de chiffres", précise-t-elle. La première étude sur la lesbophobie en France n’a été menée qu’en 2017, encore une fois, par SOS Homophobie. "Ce sont les seul.e.s à faire des rapports spécifiques. Nous leur en sommes infiniment reconnaissantes." Même si la ELC s’évertue, elle aussi, à lancer des enquêtes sur la violence envers les lesbiennes, la militante déplore le manque d’aide de la part d’organisations certifiées pour ces études d’ampleur nationale.
Le débat sur la PMA, terreau de la lesbophobie
L’autre information essentielle que révèle l’étude de SOS Homophobie : les actes de violence envers les lesbiennes ont augmenté de 47% par rapport à 2017. Ce qui n’est pas un hasard, selon Alice Coffin : "Il y a évidemment un lien avec le débat sur l’ouverture de la PMA à toutes les femmes", analyse-t-elle. Régulièrement promis par les gouvernements successifs depuis maintenant 7 ans, il a été remis sur le tapis dans le cadre de la loi bioéthique, en juillet dernier. L’occasion pour des association réactionnaires de se déchaîner sur les réseaux, mais aussi, dans les médias mainstream, qui n’ont pas hésité à inviter à leurs micros leurs représentant.e.s, plutôt que les principales concernées. "Plus on prolonge indéfiniment la question, plus on laisse proliférer des propos lesbophobes dans l’espace public", souligne Alice Coffin. Selon elle, ce sont bien ces débats qui contribuent à nourrir la haine quotidienne envers les lesbiennes.
Fin 2018,@EmmanuelMacron recevait associations LGBT sur 2 sujets: la PMA et les agressions.Nous(les organisations lesbiennes)avions quitté la table expliquant que mensonges sur #PMA contribuaient précisément à augmenter les agressions. La responsabilité des politiques est totale. pic.twitter.com/VdgMkIj6Kr
— Alice Coffin (@alicecoffin) 14 mai 2019
Face à la propagation de cette violence, on aurait pu espérer un engagement public. Le 24 novembre dernier, Emmanuel Macron avait ainsi invité à l’Elysée plusieurs associations LGBTI+, pour évoquer les sujets des agressions et de la PMA, liés selon le rapport publié hier. Résultat : un échec, d'après Alice Coffin, présente à cette réunion. "Il était totalement inconscient, il ne voulait pas faire le lien", déplore-t-elle. Les militantes lesbiennes conviées ont d’ailleurs fini par claquer la porte, en entendant une énième promesse quant au vote de la loi.
Que faire, alors, face à ces chiffres ? Pour Alice Coffin, les solutions existent. Tout d’abord, il faudrait accorder plus de ressources aux associations LGBTI+ et spécifiquement, à celles qui luttent contre la lesbophobie. Mais surtout, les militantes attendent aujourd’hui une déclaration ferme de la part du Président, pour condamner ces actes. "Mais elle ne vaudra rien si, des paroles, on ne passe pas à des actions concrètes", conclue-t-elle.