
Ces derniers mois, le congé paternité alimente les débats. Et pour cause, en France, seul un homme éligible sur cent décide d’en prendre un. En Espagne, la problématique est ailleurs. Instauré en 2007 dans le pays, il connait un certain succès. Un an après sa mise en place, 55% des hommes concernés prenaient déjà la totalité des deux semaines de congé qui leur était attribuée. Depuis, la durée maximale autorisée a été allongée et est passé de deux à cinq semaines, et selon le journal espagnol El Pais, ce n’est que le début puisqu’elle devrait passer à seize semaines à l’horizon 2021.
Selon une étude économique publiée dans la revue Journal of Public Economics, les retombées de ce congé paternité sont plutôt bonnes. Non seulement les hommes ayant pu bénéficier de ce congé se sont impliqués plus largement dans l’éducation de leurs enfants, mais surtout, le nombre de mères ayant rapidement retrouvé le chemin du travail a augmenté. Mais là n’est pas le plus important. Selon des économistes des universités de Barcelone et de Pompeu Fabra, dans les familles ayant pu bénéficier du congé paternité, le désir d’agrandir la famille est moins grand… du moins chez les hommes. Deux après la naissance du dernier enfant en date, la probabilité de vouloir un autre bébé était de 7 à 15% plus faible chez les pères ayant pris le congé, que ceux qui n'en n'avaient pas bénéficié. En revanche, ces chiffres ont connu un rebond considérable chez les femmes aux alentours de 2006, soit au moment du lancement du congé parental pour les pères. Depuis, ils n’ont cessé d’augmenter, les femmes ayant désormais la possibilité de se reposer sur leur conjoint pour élever leurs enfants. A l’inverse, les hommes, plus conscients de la charge que représente un enfant, semblent être beaucoup moins partants pour fonder une famille nombreuse.
Surprenant ? Pas vraiment... Mais attention, les économistes à l’origine de cette étude appellent à prendre ces résultats avec des pincettes. L’instauration du congé paternité en Espagne n’est, selon eux, pas la seule donnée à prendre en cause, le pays ayant été secoué par une crise économique d’ampleur en 2008, ce qui pourrait expliquer une envie moins forte de faire des enfants aujourd’hui. Par ailleurs, le magazine Quartz, qui étudie également ces données, remarque que le pourcentage de pères prenant un congé parental est de plus en plus élevé dans le pays, à tel point qu’il commence à se rapprocher de celui des mères. Tout n’est donc pas perdu.