Juliette Armanet : la Reine de cœur
Le titre de son premier album, Petite Amie, s’imposait : c’est celle qu’on voudrait tous avoir, et l’une des artistes françaises les plus buzzées du moment. Force est de constater que c’est amplement mérité. Un timbre qui rappelle celui de Véronique Sanson, tout en hauteur et en élégance, un piano comme chevalier servant et des chansons qui nous parlent à toutes. Chercher l’amour, le trouver, le perdre, le rêver, le fantasmer : Juliette Armanet décrypte nos émois secrets à travers “Cavalier solitaire“ ou “L’Indien“, sur une trame sonore plutôt électronique à la production cristalline. Le kitsch n’est jamais loin, mais offre justement du piquant aux chansons ultra sentimentales de celle qui s’inscrit dans la nouvelle mouvance des poppeuses françaises, de Cléa Vincent à Fishbach.
Les paroles qu’on aime : “Où es tu mon alter ? / Où es tu mon ego ? / Pour moi t’étais ma mère, mon père, mon rodéo / Je traverse le désert / L'amour en solitaire.“
Juliette Armanet, Petite Amie (Barclay / Universal). En concert au Printemps de Bourges et aux Francofolies de la Rochelle.
Frànçois & The Atlas Mountains : belle plume made in France
On ne présente plus le très doué Frànçois Marry, qui, avec ses Atlas Mountains, a su rendre à la pop francophone ses lettres de noblesses. Sans doute parce qu’il a su transcender ses influences anglo-saxonnes sans tomber dans le copier-coller. Extrêmement cultivé, nourri de musique traditionnelle africaine comme du grunge des années 90, il a vécu ici et là, entre Saintes, Paris et Bristol, avant de s’installer à Bruxelles où il a enregistré ce nouvel albumécrit dans l’ombre des attentats de 2015 et de la détresse des migrants. Pas de leçon de morale, mais une conscience éveillée qui n’en oublie pas moins d’être pop, mélodique et efficace. Joli tour de force.
Les paroles qu’on aime : “Dire s'y estimer content / D'encore dégager quelques excédents / Eux sillonnent le continent de long en large / Recherchent un place dans le sens de la marche / L'essence du pays échappe / L'histoire la rattrape, l'exode les happe“.
Frànçois & The Atlas Mountains, Solide mirage (Domino).
Blondino : Tendre est la nuit
Si c’est d’après le roman Grand Blondino du suédois Sture Dahlström que Tiphaine Lozupone a choisi son nom de scène, ses influences sont diverses et variées : de Björkà Sylvia Plath, de Son Lux à Alain Bashung. Après un premier EP très remarqué en 2016, Blondino vient de sortir son premier album, Jamais sans la nuit, recueil de chansons à la plume ciselée, poétique voire lunaire, mais très ancrée dans le réel. En guise de thème central, la couleur bleue. Que l’on retrouve sur la pochette du disque, dans le single du même nom qui évoque les déceptions d’un “amour shaker“. Et aussi pour le blues, synonyme d’une mélancolie qui lui colle à la peau malgré une indéniable “foi en l’avenir“.
Les paroles qu’on aime : “Cocktail, cocktail dans salon bleu / Cocktail, cocktail la nuit en mieux / Cocktail, je tente miraculeux / Cocktail serpente son venin bleu“
Blondino, Jamais sans la nuit (Tomboy Lab / Sony). En concert le 27 avril aux Etoiles, à Paris
Marie-Flore, candide et incandescente
Après un premier album anglophone où le folk rencontrait l’électro-pop, Marie-Flore, protégée de Peter Doherty et proche de Baxter Dury, a décidé de ne se consacrer qu’à la langue de Molière. En attendant son second opus, l’EP “Passade Digitale“ cultive un format de chanson synthétique et vénéneuse : amours cruelles et tromperie des apparences, narcissisme brisé et féminité exacerbée, le tout servi par une voix de Lolita corrompue par le temps qui passe. Marie-Flore nous charme non seulement en solo, mais aussi au sein du groupe électro-pop insolente OMOH, formé par des musiciens complices de Julien Doré.
Les paroles qu’on aime : “Toi, tu ne vois pas les signes / Et derrière mes longs cils / Je n'ai plus trop de self-estime / Pourquoi je repars? / Dans ce hall de gare“
Marie-Flore, Passade Digitale, sortie le 14 avril. En concert le 29 avril à la Loge, à Paris.
Paupière : les Xavier Dolan de la pop
Pierre-Luc Bégin, Julia Daigle et Éliane Préfontaine ont la petite vingtaine, sont québécois et, depuis un premier EP paru en 2016, Jeunes Instants, cultivent un jardin pop eighties sous influence Elli & Jacno. Charmant, léger mais loin d’être futile car une ombre mélancolique voile leur musique colorée et synthétique… Certains parlent de Xavier Dolan version sonore. En effet, on peut voir une affinité dans la manière très sensuelle, très référencée et très théâtrale d’arborer les petits et grands drames de la vie. En attendant un premier album qui paraîtra ces prochains mois, on savoure leur tout nouveau single, « Rex ».
Les paroles qu’on aime : “Même si tard le soir / Tu conquis au hasard / Jamais je ne saurais et c’est bien mieux comme ça /Tu es comme les rois des pays d’autrefois / Riches mais impuissant / J’oublie avec le temps.“
Paupière, Rex (Entreprise)