Rituels d’inspiration chamanique, minéraux qui favorisent la circulation des énergies... La beauté serait-elle en pleine crise spirituelle ? A en croire les experts, elle serait plutôt en phase de reconnexion active. "Face aux problématiques environnementales, nos sociétés sont à la recherche d’un meilleur ancrage terrestre et physique, décrypte Aurélie Chaffel, directrice associée du cabinet de conseil Perspectives-Lab. Ce qui ouvre la voie à une beauté plus émotionnelle, tournée vers la nature et ses forces vitales, où chacune se veut connectée à la fois à son intériorité et à une forme d’universalité."
D’où l’engouement pour toutes les pratiques supposées favoriser le "recentrage", du yoga à la méditation, en passant par la respiration. Dernière venue, tout droit débarquée de la côte Ouest des Etats-Unis, la beauté "now age", ce new age revu et corrigé à la sauce d’aujourd’hui, entre l’artisanal, l’ésotérique et le green.
A LA RECHERCHE DE L'EQUILIBRE ORIGINEL
Qu’il s’agisse de formules à base de plantes sauvages cueillies à la main, ou d’élixirs confectionnés à la lumière de la lune, dans cette tendance – plus que dans aucune autre –, le bénéfice réside autant dans l’histoire racontée et dans l’expérience promise, que dans le résultat cosmétique escompté. "Pour nous, une composante essentielle du bien-être consiste à favoriser et entretenir une connexion étroite avec la terre et les énergies qui la gouvernent", expliquent Kerrilynn Pamer et Cindy DiPrima, à la tête de la boutique CAP Beauty, à Soho, qui rassemble la fine fleur de la beauté now age, et où sont régulièrement organisés des ateliers avec des médiums, artistes et coachs en "empowerment". "Ce qui compte, c’est l’intention. Quand on crée un produit, on a beau avoir la même liste d’ingrédients, si l’intention est différente, le résultat n’est pas le même", poursuit Sam Guelimi, qui a ouvert à Paris Ici Selfcare (Ici-selfcare.com), un studio de yoga dédié aux femmes, accompagné d’un mini-concept store et d’un café qui propose des potions à base de laits végétaux et superaliments, "nourritures du corps et de l’esprit » (Glowingcafe.com). "On est dans une quête de l’équilibre originel, qui oppose à nos sociétés fondées sur la raison un besoin essentiel de libération des émotions", décrypte Aurélie Chaffel.
###related###
RITES ANCESTRAUX & PRATIQUES 2.0
"Il y a une fascination pour l’idée de communion avec la nature, qui fait écho à notre rapport avec les animaux, au veganisme et à la question de la valorisation des ingrédients, confirme Pierre Bisseuil, directeur de recherches pour le cabinet de tendances Peclers. Le tout s’appuie sur des développements considérables autour des civilisations anciennes." De fait, entre pratiques chamaniques et rituels ayurvédiques 2.0, tout, dans cette tendance, semble avoir été écrit il y a des siècles, avant la pollution, le stress et les smartphones.
Nostalgique, la beauté now age ? Pas tout à fait. "L’aspiration à une connexion cosmique n’est pas nouvelle, mais désormais on n’hésite pas à accoler à ces pratiques à connotation presque magique des explications scientifiques." Un peu comme si les dernières avancées (neurologiques, anthropologiques...) venaient a posteriori valider d’anciennes pratiques. Et qu’on redécouvrait aujourd’hui tout l’intérêt de ces croyances et rituels ancestraux. Un exemple ? "Rien que la découverte récente que nous avons des neurones dans l’intestin remet complètement en cause l’opposition traditionnelle entre le corps et l’esprit, le rationnel et l’émotionnel", analyse Aurélie Chaffel. En effet. Et pourtant, validation scientifique ou pas... La beauté "now age" a-t-elle vraiment besoin de justifications rationnelles ? Entre nous, pas sûr. Le plus important n’est-il pas qu’elle réponde à nos envies ? Dans la plus pure logique holistique, d’ailleurs, ce qui fait du bien à l’intérieur se voit forcément (ne serait-ce qu’un peu) à l’extérieur. Non ?